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La névralgie: apprendre à apprivoiser cette condition comme une nouvelle amie

  • Photo du rédacteur: Nadine Duguay-Lemay
    Nadine Duguay-Lemay
  • 2 déc. 2019
  • 9 min de lecture

Dernière mise à jour : 30 mars

J'ai décidé de vous partager un aspect méconnu et plus secret à mon sujet, soit le fait que j'ai appris au cours des derniers mois que je vis avec une condition neurologique nommée la névralgie. Bien que le nom de la condition est chose nouvelle dans ma vie, sachez que je vis avec celle-ci depuis mon adolescence. Les raisons qui me motivent à partager avec vous cette condition et l'impact qu'elle détient dans mon quotidien sont à plusieurs niveaux: tout d'abord, c'est pour vous parler de l'importance de la validation de quelque chose qui est ressenti chez l'être humain. Ensuite, si mon témoignage peut aider une autre personne atteinte de névralgie ou ses proches à mieux comprendre la condition, ça aidera à mieux la démystifier. Enfin, ça vous permettra peut-être de comprendre certains comportements que j'ai adopté au fil des années pour composer avec les répercussions de celle-ci.


Qu'est-ce qu'est la névralgie:

Une névralgie se caractérise par une douleur subaiguë, évoluant par poussées, à type de décharges électriques, dans le territoire correspondant au nerf atteint. Elle peut s'accompagner de troubles sensitifs ou moteurs (sciatique), de symptômes visuels (nevralgie faciale du nerf trijumeau). Généralement, un fond de douleur persiste entre deux crises. (source: Santé magazine).  


Le type de névralgie dont je suis atteinte est la névralgie d'Arnold (NA) ou arnoldalgie ou névralgie du grand occipital. C'est une neuropathie périphérique du cou et de la tête caractérisée par une « céphalée paroxystique unilatérale d’origine cervicale »[1], causée par une « irritation ou une compression du grand nerf occipital (GNO) postérieur et/ou du petit nerf occipital. (voir photo ci-dessous démontrant bien le nerf en jaune qui est affecté; source: Wikipédia). Je ressens donc les douleurs (que je détaillerai) dans la région occipitale de ma tête.

La façon dont je décris la névralgie est comment je la ressens: soit par des sensations de chocs électrique ou d'aiguilles chaudes s'enfonçant dans ma tête à plusieurs reprises dans une journée ou dans une semaine. Ces sensations se répartissent aussi sur un spectrum de douleur; si on imagine une échelle de douleur de 1 à 10, je compose avec une douleur atteignant un 3, 4 ou 5 quotidiennement alors que des sensations de douleur de 8, 9 , 10 sont plutôt ponctuelles. Vivre avec une douleur variant de 3 à 5 est assez gérable et je me compte parmi les chanceux, puisque le médicament (carbamazepine) que je prends semble atténuer de 40 à 50% ma douleur. Le hic est que les sensations de douleur de 8 à 10 surviennent plus fréquemment depuis le printemps dernier et ces incidences de douleurs, lorsqu'elles surviennent, sont non seulement beaucoup plus difficiles à gérer, mais prennent du temps et énormément d'énergie à récupérer. J'ai constaté que le stress et la fatigue comptent parmi mes plus gros éléments déclencheurs.


Une condition qui date depuis l'adolescence

Lorsque j'avais 11-12 ans, je pratiquais plusieurs sports, dont le patinage artistique. Je me rappelle être tout d'un coup affecté par ces sensations de chocs électriques lorsque je patinais. Je ne sais pas si j'en ai parlé la première fois que j'ai ressenti ces sensations car je pense avoir internalisé le tout. Je me rappelle toutefois en avoir éventuellement parlé autour de moi et l'attitude des adultes était de normaliser le tout ou de ne pas bien écouter mes symptômes. On me disait: "oui, oui Nadine, ça arrive à tout le monde des sensations comme cela". Alors j'ai continué à internaliser le tout jusqu'à ce que ça persiste. Ma mère m'a alors fait un rendez-vous chez notre médecin de famille lorsque j'avais 15 ou 16 ans pour consulter et il s'avéra que cette rencontre fut très marquante. Notre médecin de famille m'a fait comprendre après explication de mes symptômes que tout était dans ma tête. Elle ne se doutait pas alors que la condition était littéralement dans ma tête et réelle, car la recherche n'a démontré qu'à partir de 2010 les preuves scientifiques pour expliquer la condition. Néanmoins, cette rencontre fut symbolique, car j'en suis ressortie avec la rage dans l'âme, me sentant incomprise et pensant que j'étais folle, littéralement. J'ai donc longtemps pensé que je m'imaginais des choses et cette croyance fut renforcée à maintes reprises, alors que la condition continuait et que je voyais des neurologues qui me disaient que je souffrais de migraines. Alors que j'habitais à Edmonton en Alberta de 1996 à 1998, j'ai eu quelques épisodes encore plus pointus qui m'ont souvent amenés au service d'urgence de l'hôpital pour finalement me faire référer à nouveau à mon neurologue à Moncton pour des tests plus avancés. On ne trouvait toujours rien. Bref, le cycle a duré pendant de nombreuses années, mais comme les grosses douleurs (celles de 8 à 10) survenaient plus ponctuellement, je m'étais dite que c'était tout simplement naturel chez-moi et j'en étais venue à être résignée à tout cela et traiter la condition comme une migraine sévère. La dernière fois que j'avais eu un gros épisode (dont je me souviens en tout cas) était lorsque j'étais enceinte de ma fille Zoey, donc il y a de cela 13 ans passés. En 2015, j'ai vu un (nouveau) neurologue à nouveau car je ressentais des sensations étranges d'engourdissements dans les membres du côté droit. Après avoir passé des tests de sang et une IRM du cerveau et du cou, le neurologue découvre que j'ai une hernie cervicale entre les vertèbres C5 et C6. Je suis référée à un neurochirurgien afin de discuter les options de traitement. Je vous épargne les détails de la suite afin d'en arriver à la découverte de mon diagnostic, mais sachez que ce fut après avoir demandé une consultation avec un autre neurochirurgien que je me suis rapprochée du diagnostic.


Le point tournant

En avril dernier, j'étais en voiture avec ma fille pour aller au marché des fermiers. En chemin, je me suis légèrement tournée vers elle pour lui parler et la douleur est survenue, telle un gros choc électrique de 10 sur 10! J'ai crié tellement ça m'avait fait mal, ce qui a malheureusement effrayé ma fille sur le coup. Sa gestion de la situation m'a réellement impressionnée et je dois dire que je suis très heureuse qu'elle a été avec moi pendant cet incident (comme quoi ça peut être dangereux lorsqu'on est seul et surtout si on conduit). La douleur a perduré toute la journée dans mon cerveau, me laissant (après le choc électrique) avec une sensation d'avoir eu été frappée durement derrière la tête avec un bâton de baseball. J'ai eu cette sensation presque toute la journée, je n'avais plus d'énergie et j'avais des nausées ainsi que des sensations de vertige. Bref, j'ai été pas mal comatose toute la journée.


Lorsque j'ai pris du mieux, j'ai pensé que c'était parti, mais hélas, les chocs sont revenus pendant la semaine. J'ai donc demandé à revoir mon neurologue immédiatement après cet incident car ma condition du passé était revenue et ne me quittait plus. C'est lui qui a été le premier à parler de la névralgie. En effet, ces sensations de choc électrique n'avaient aucun lien avec l'hernie cervicale, car elles survenaient toujours dans le coté gauche de ma tête alors que l'hernie était située du côté droit de ma colonne vertébrale. En me posant plus de questions et en lui révélant que j'avais cela depuis très longtemps, il mentionna cette possibilité de névralgie. Comme je voyais le 2e neurochirurgien en juillet, il a proposé que je prenne du carbamazepine afin de voir si cela atténuait la douleur. Ce médicament est utilisé pour traiter les troubles épileptiques, mais peut s'avérer assez efficace dans le traitement de la douleur occasionné par la névralgie. Entre-temps, sachez que je compose plus difficilement avec la condition sur un point psychologique, car je crains maintenant que la douleur survienne alors que je suis en rencontres avec des gens ou encore lorsque je parle en public, chose que je fais assez régulièrement dans le cadre de mon travail. Cette peur commence à devenir une réelle phobie et je me rends compte que de parler en public alimente cette peur. Bref, ça me faisait broyer pas mal de noir, car je devais me donner tout un "pep talk" à chaque fois que je devais parler publiquement ou rencontrer des gens tout en pensant à de multiples stratégies si ça m'arrivait alors que j'étais sur scène ou dans une rencontre.


En juillet, je rencontre le docteur Charest (neurochirurgien) et nous discutons des sensations de douleurs aiguës que je ressens. Docteur Charest est la deuxième personne après Docteur Alvarez (mon neurologue) à parler de névralgie et d'en expliquer les effets. Il propose sur place un traitement de corticoïdes et je ressors de son bureau avec une infiltration de corticoïdes dans la tête. On se revoit 6 semaines plus tard pour voir si l'infiltration a fonctionné et malheureusement, je ne vois pas de changements dans la condition. C'est là qu'il me propose de voir son collègue, le docteur El-Helou qui est plus spécialisé dans le traitement de la douleur et qui connaît des méthodes novatrices. En passant, le docteur El-Helou est effectivement parmi les meilleurs, ayant fait récemment les manchettes pour avoir été le premier neurochirurgien au Canada à réaliser une opération pour soulager la douleur chronique.


Ma rencontre avec El-Helou

La semaine dernière, j'ai rencontré le docteur El-Helou. D'une écoute attentive, il m'a expliqué que la névralgie du grand occipital est bel et bien une condition neurologique réelle et qui cause de grandes douleurs. Ça ne fait que 15 à 20 ans environ que la condition est médicalement acceptée, expliquant le fait qu'on n'en parlait pas dans mon adolescence ou dans ma vie de jeune adulte. Il y a espoir et traitements possibles, passant par continuer à prendre mon médicament, à recevoir des injections de botox et à explorer la chirurgie. J'explore mes options au cours des prochains mois, mais l'important dans tout ceci est que je suis ressortie de cette consultation le coeur léger et avec l'impression que j'avais libéré un lourd fardeau de mes épaules.


C'est quelque chose que de vivre avec des sensations bien réelles, mais qu'on finit par normaliser et penser qu'on est seul à vivre cela, ou encore que ça se passe dans notre tête dans le sens figuratif. Je sais que j'ai appris à composer avec la douleur au fil des années et que je ne démontre pas 9 fois sur 10 l'impact de la douleur (à moins que ça soit une sensation de douleur de 8 à 10). Pour ma famille et surtout mon mari, cela peut être difficile à gérer, car ils pensent que je vais mieux, alors que je souffre en silence. Je ne pense pas être la seule à adopter ce mécanisme de gestion de la douleur. On vient qu'on est tannés de se faire poser des questions, mais parfois on aimerait se faire demander comment ça va plutôt que l'entourage suppose des choses à notre place. On vient à normaliser le tout, donc cela nous amène à sous-estimer l'impact aussi de la douleur. Cette leçon, je l'ai apprise à mes dépends en octobre dernier alors que j'avais eu une grosse semaine avec plein d'épisodes de chocs et je suis quand même aller animer une soirée alors que j'aurais dû me désister. Tout comme ma famille, mes amis et mon équipe, j'apprends à naviguer les effets de la névralgie et à prendre soin de moi.


La conclusion?

J'ai appris au cours des derniers mois à quel point la validation d'une condition est importante pour l'être humain. Que ce soit une condition physique, mentale ou une maladie, on aspire tous je pense à comprendre ce qui se passe dans notre corps. Je ne sais pas pour vous, mais dans mon cas, j'ai toujours dit que je préférais savoir et connaître, plutôt que de rester dans l'ignorance ou dans l'inconnu. On peut passer au mode prévention et traitements quand nous savons ce qui se passe et ce que nous traitons. Comprendre aussi que j'avais une condition bien réelle dans ma tête et non au sens figuratif a validé toutes mes souffrances et expériences passées. Tous ces épisodes dont j'ai souffert, ont un sens maintenant dans ma vie et cette connaissance apporte un baume sur mon être et sur mon âme. Je ne peux qu'imaginer comment une personne peut se sentir face à une condition quelconque et pour laquelle elle n'a pas de réponses, en plus d'avoir son entourage lui dire que c'est "normal" alors que les symptômes continuent. En passant, pour la personne atteinte, se faire dire que c'est normal n'aide vraiment pas les choses. J'oserais dire que ça empire la situation.


J'ai appris que le soutien de nos proches est hyper important dans la gestion de la condition, C'est difficile toutefois pour eux de pouvoir comprendre ce que l'on vit car ils ne ressentent pas la douleur ou les effets. La situation idéale vient lorsqu'ils apprennent à détecter en nous observant. Mon mari , tout comme mon équipe, reconnaît quand j'ai une moins bonne journée et que je suis affligée par la douleur. Ça se voit dans mes yeux paraît-il ou dans mon état d'âme général. Le fait qu'ils le reconnaissent et sont là pour intervenir au besoin est une source de réconfort.


Enfin, j'apprends aujourd'hui à apprivoiser ma névralgie. Elle m'habite depuis longtemps et je l'ai perçue pendant toutes ces années comme une ennemie, voire même être un synonyme de folie. Maintenant que je comprends la condition, je suis plus à l'écoute de mon corps, de mon être. Je cherche les sources ainsi que les éléments déclencheurs. Je prends soin de moi pour pouvoir mieux la comprendre, aussi étrange cet énoncé semble-t-il. Je suis remplie d'espoir pour le futur car j'ai des réponses, je suis bien entourée et je suis traitée par l'un des meilleurs.


Voila les raisons pour lesquelles je lui dis: "Bonjour névralgie: on devient des amies? "



 
 
 

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