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Juste, (pas) assez, oui...est-ce que ces mots hantent votre quotidien ?

  • Photo du rédacteur: Nadine Duguay-Lemay
    Nadine Duguay-Lemay
  • 16 oct. 2023
  • 7 min de lecture

Dernière mise à jour : 30 mars

Depuis quelques semaines, je goûte à une nouvelle réalité professionnelle et personnelle et je m'habitue tranquillement à une nouvelle cadence qui est encore très occupée, mais qui me laisse un peu plus respirer. Je peux aller prendre des marches à (presque) tous les jours, écrire, cuisiner des repas santé et explorer. J'ai même essayé un atelier de peinture vendredi dernier ! C'est la première fois de ma vie où je m'accorde ce temps et cet espace pour retrouver la santé, créer et découvrir de nouvelles choses. Je ne vous cacherai pas que cette aspiration est ponctuée de peurs et de doutes au quotidien et que je ne trouve pas évident de naviguer tout cela. Ce que je découvre à date me surprend et me fait réfléchir grandement. Je vous partage donc cette ambiguïté dans ce texte avec l'espoir que certains d'entre vous ont déjà passé par là et auront des conseils à m'offrir ou que mes propos résonneront tout simplement avec vous.


Je fais "juste"...ce mot limitant !

Au cours de la fin de semaine, je suis allée dans un marché local pour faire quelques achats pour les fêtes, mais j'y allais surtout pour aller voir une connaissance professionnelle, Kathryn Basham, qui exposait ses belles oeuvres en céramique. Je suis devenue une grande fan de son travail, dont la démarche artistique est une fusion de ses origines américaines (elle vient du Kentucky) et de son amour du Nouveau-Brunswick (qu'elle habite depuis plusieurs années) ainsi que l'incorporation d'éléments naturels dans son travail. Je suis aussi très intéressée par son cheminement, car elle a vécu une grande transformation professionnelle au cours de la dernière année et elle explore sa passion pour la création artistique avec Kentucky Brunswick Ceramics. Pendant notre conversation entourant mon achat, je lui partage que « Je fais juste mon MBA et j'enseigne à temps partiel » et c'est là qu'elle m'arrête en disant: «N'utilise pas ce mot : «juste» Nous avons cette tendance à limiter ce que nous faisons comme si ce n'est pas assez. C'est plus qu'assez. Mon conseil: essaie d'éliminer ce mot de ton vocabulaire ». Je vous avoue que lorsqu'elle m'a dit cela, j'ai commencé à avoir les yeux larmoyants puisqu'elle venait de toucher une corde très sensible. En fait, l'ambiguïté que je ressens, elle provient de ce genre de pensées qui m'habitent constamment. Ces pensées limitantes et culpabilisantes qui sont toujours axées sur la productivité, la performance ou encore sur l'estime de soi (suis-je assez telle que je suis ?)


À titre d'exemple banal, j'étais habituée de prendre mon repas du midi en continuant de travailler. La pause que je m'accordais était le temps de réchauffer celui-ci. Ces dernières semaines, je dîne et tente de m'accorder une plus grande pause en écoutant une émission ou en lisant (je sais que certains diront de viser que de manger et rien faire d'autre) et je vous avoue que même cela est très difficile à faire. Je suis assise 10 minutes et je me culpabilise que je devrais aller faire ma préparation, travailler sur mon cours, ou de nettoyer la cuisine... faire quelque chose quoi ! Ces pensées sont constantes et je pense qu'elles proviennent autant de facteurs intrinsèques, dont les traumas que j'ai vécu, les modèles que j'ai eu (on travaillait très fort chez-nous) et la valeur que je m'accorde en tant que personne, mais également extrinsèques, en passant par notre société qui valorise la productivité et le statut professionnel ainsi que la double charge professionnelle et familiale qu'assument les femmes. Kathryn vous dirait que c'est aussi causé par le fait que nous sommes conditionnées dès un jeune âge en tant que femme à être humble et diminuer ce que nous faisons. Puisque le but de ce texte est de vous offrir une réflexion personnelle basée sur mes expériences et mes observations, je ne vais par creuser davantage ma recherche sur ces facteurs pour le moment.


Apprendre à dire non.... ouf pas évident encore !

Ces pensées limitantes se manifestent aussi par ma difficulté à dire non. J'ai déjà partagé comment je suis habituée d'être la personne qui fait des choses pour les autres et qui est sollicitée pour des conseils ou lorsqu'on a besoin d'elle. Vous savez, il y a très peu de gens qui me contactent pour m'offrir des sorties, prendre de mes nouvelles ou pour apprendre à mieux me connaître. Je n'ai pas besoin d'avoir de nombreux amis non plus et je suis très heureuse avec ceux qui sont dans ma vie. Je vous illustre tout simplement qu'il est plutôt rare que les gens me contactent parce qu'ils se soucient de moi, tout simplement. On me contacte parce qu'on veut un conseil, une faveur, une lettre de référence, une connexion, etc. C'est un rôle que j'ai endossé très jeune et que je connais bien, alors c'est facile pour moi de l'assumer. Or, il est important de reconnaître aussi qu'il faut dire non parfois pour préserver sa santé. J'avoue que cela sera sans aucun doute un apprentissage que j'aurai à faire tout au long de ma vie. Apprendre à dire non vaut aussi le coup envers des opportunités professionnelles et je sais que c'est la Nadine "de survie" qui est la petite voix omniprésente que j'entends et qui réussit à me convaincre de toujours avoir un plan A, B, C, D, E en place. J'ai vécu à certains moments dans ma vie le sentiment d'être coincée et d'avoir très peu d'options parmi lesquelles choisir et le besoin d'avoir toujours plusieurs plans en place semble être devenu mon modus operandi.


Assez, c'est assez... vraiment !

J'ai été surprise de découvrir certaines autres pensées se manifester ces dernières semaines. Par exemple, cette petite voix qui me dit à tous les jours que je devrais contribuer davantage dans la maison parce que mon mari travaille à temps plein et que mon apport économique au revenu familial n'est pas le même. Pourtant, nous avons rodé un très bon partage des responsabilités qui nous convient à tous les deux et je peux vous dire que mon programme d'études et mon cours au collège demandent chacun un minimum de 20 heures par semaine chacun d'investissement, donc voilà un travail à temps plein, mais c'est comme si ce n'est pas assez. Je maintiens le même horaire de me réveiller le matin en même temps que mon mari ou parfois même plus tôt et je me retrouve à chercher à être productive. Je lui ai même partagé ces propos à plusieurs reprises: «aujourd'hui j'ai été productive parce que j'ai pu terminer XYZ» ... C'est fou comment cet élan de vouloir accomplir est présent ! Mon mari appuie mes aspirations et fait tout ce qu'il peut pour que je m'accorde ce temps et cet espace. C'est réellement un combat intérieur qui m'appartient et c'est grâce à des gens comme Kathryn qui me refile leurs conseils et d'être dans la gratitude que je parviens à surmonter ces voix. Notamment, j'accueille les moments qui me permettent d'être totalement présente pour mes deux enfants ou qui me permettent des élans de créativité et de bien-être.


Ce sentiment de "ne pas en faire assez" se présente aussi lorsque j'observe les réactions dans mon entourage après leur avoir partagé ce que je fais ou ce que sont mes plans. Celles-ci sont très révélatrices et font écho à mes constatations que l'on valorise bien plus la productivité et le statut professionnel que le savoir-être ou le bien-être d'une personne. Très peu de gens s'intéressent à mon programme d'études, ce qui est très intéressant puisqu'il est pourtant très novateur et unique. On s'intéresse plus à savoir avec quelle université je fais ce programme de MBA. Plusieurs pensent que j'enseigne à temps plein au collège et que c'est maintenant ma carrière à temps plein. Je dois constamment rectifier que j'enseigne à temps partiel et pour le moment sur une base temporaire et que c'est pour appuyer mes études. J'ai enseigné à maintes reprises dans ma vie autant pour le secteur public que privé et c'est l'une des cordes à mon arc que j'apprécie grandement, car je peux y retourner en tout temps et surtout de façon ponctuelle. Si je me fie à l'un des commentaires récents reçus d'une connaissance, ce fut de me dire "ben bon succès avec l'enseignement et tout ça". Ces propos m'ont fait sourire et illustrent parfaitement que pour cette personne en tout cas, elle n'avait pas compris du tout mes choix et mes aspirations. C'est possible que je les avais mal expliqué aussi, mais si j'ai besoin d'expliquer, est-ce que ça ne revient pas à ce que je disais quant à ce que nous valorisons comme société ? Je salue ici les amis et les membres de ma famille qui ont démontré un réel intérêt envers ce que j'apprends, ce que je pense et comment je me sens. Merci aussi à toutes les personnes qui m'encouragent à ralentir et qui applaudissent ou apprécient les moments que je prends pour moi. Quelqu'un me remerciait plus tôt aujourd'hui pour afficher mes photos sur les médias sociaux et j'ai grandement apprécié cela puisque je découvre une passion pour la photographie ces temps-ci. Je suis très loin d'être une photographe et ne me contactez surtout pas pour aller vous prendre en photo, mais ma fibre artistique se manifeste de d'autres façons et c'est en lui laissant la place et l'espace que je vais la faire grandir.


Malgré ces ambivalences, je reviens toujours à mon plan de m'accorder du temps et de l'espace pour explorer, respirer et me ressourcer. Kathryn m'avoue que c'est encore une lutte constante pour elle que de naviguer ces pensées, mais elle reconnaît son cheminement et elle me dit que ça devient de mieux en mieux. Je me réconforte à cette idée et en attendant, je m'accroche aux moments de créativité, de bien-être et de gratitude.


Au plaisir de lire vos suggestions, commentaires ou de lire vos expériences.


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Image de Shutterstock; choisie pour Kathryn qui incorpore des feuilles dans ses oeuvres en céramique.

 
 
 

3 commentaires

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Florence Gouton
Florence Gouton
11 nov. 2023
Noté 5 étoiles sur 5.

Merci pour ce texte, à effet "miroir". Ce nouveau rythme à apprivoiser s'annonce comme une aventure passionnante, à la découverte d'une Nadine qui a toujours été là, et qui peut aujourd'hui s'exprimer. Chérie-la, écoute-la, prend le temps de la découvrir : elle le mérite et a besoin de toute ton affection et de temps pour s'épanouir encore ! Ce temps que tu as aujourd'hui la sensation de perdre au dépend d'une productivité comptera sans doute comme l'un des plus précieux de toute ta vie.

"C'est le temps que tu as perdu pour ta Rose qui fait ta Rose si importante" (Saint-Exupéry)

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Invité
10 nov. 2023
Noté 5 étoiles sur 5.

Merci Nadine de partager cette belle reflexion. Je me retrouve dans ton texte. Moi aussi je fais souvent « juste » …. Ça me fait du bien de te lire. Merci.

Modifié
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Nadine Duguay-Lemay
Nadine Duguay-Lemay
10 nov. 2023
En réponse à

Merci beaucoup :)

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